Le Programme Aga Khan pour la musique (AKMP) soutient le travail de musiciens et d’enseignants de musique talentueux pour leur permettre de perpétuer, développer et transmettre les traditions musicales faisant partie intégrante de leur patrimoine culturel. Connu auparavant sous le nom Initiative Aga Khan pour la musique, l’AKMP a été créé en 2000 pour relancer la transmission des traditions musicales, une pratique qui avait été stoppée au cours de l’ère soviétique, et pour remédier au manque de ressources dédiées au développement des traditions artistiques qui étayent et pérennisent les identités locales et le patrimoine culturel en Asie centrale.
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L’Académie du Maqam a formé sept nouveaux maîtres de musique
Au cours des 20 dernières années, l’AKMP a contribué à la mise en œuvre de deux projets d’enseignement de la musique à long terme au Tadjikistan, dont l’un est toujours en cours, à l’organisation de nombreux concerts et au lancement d’initiatives de préservation et de documentation de la musique.
Basé à Khodjent, le Centre Khunar (littéralement, « talent ») propose un programme de formation sur le modèle ustad-shagird (maître-apprenti) destiné aux élèves du secondaire de sept districts du nord du Tadjikistan (Khodjent, Pendjikent, Istaravchan, Buston, Isfara, Konibodom et Mastchoh) ainsi que dans plusieurs autres villes, dont Hisor, Darvoz, Kulob et Douchanbé. En 2021, les 33 maîtres du Centre Khunar ont encadré 192 élèves. De nombreux enseignants de l’établissement sont des retraités aux revenus limités pour qui l’occasion d’enseigner aux jeunes est une entreprise économiquement et socialement bénéfique.
Le centre parraine souvent des concerts, produit des émissions de télévision pour les chaînes régionales, publie des livres et des manuels de musique et met à disposition de ses élèves du matériel vidéo et audio dans le but de réaffirmer la place du patrimoine musical dans la vie contemporaine du pays. Sous la tutelle du Centre Khunar, des groupes de musique de Douchanbé et Khodjent se sont produits au festival Ethno-jazz de Douchanbé et au festival Roof of the World de Khorog. Avec le soutien de la mairie de Khodjent, le centre supervise également un laboratoire de musique dont les dix membres, tous diplômés du programme ustad-shagird, interprètent, arrangent et composent des œuvres de musique traditionnelle et néotraditionnelle. En collaboration avec le ministère de la Culture et le ministère de l’Éducation de la République du Tadjikistan, il conçoit des ressources pédagogiques adaptées à l’âge des élèves et basées sur le patrimoine musical du pays.
De 2003 à 2015, l’AKMP a appuyé les activités de l’Académie du Maqam, un établissement basé à Douchanbé et fondé par le célèbre musicien et musicologue tadjik Abduvali Abdurashidov. L’Académie visait à former un groupe d’élite de futurs grands musiciens tadjiks sur la base d’une étude approfondie du maqam, la musique traditionnelle qui s’est développée à Boukhara, Samarcande, Khodjent et dans d’autres centres culturels urbains où des populations tadjikes s’étaient établies.
Sous la tutelle d’Abduvali Abdurashidov, les élèves y ont étudié les éléments historiques, théoriques et pratiques de la tradition du maqam et ont intégré un ensemble musical dont le CD Invisible face of the Beloved: Classical Music of the Tajiks and Uzbeks (L’invisible visage de l’être aimé : musique classique des Tadjiks et des Ouzbeks), publié en 2006 et produit par Smithsonian Folkways Recording en tant que deuxième volume de l’anthologie CD-DVD Music of Central Asia (Musique d’Asie centrale), a été nommé pour un Grammy Award.
En 2016, à l’occasion du 25e anniversaire de l’indépendance du Tadjikistan, le ministère de la Culture a publié l’édition critique en six volumes de l’Académie du Maqam sur le shashmaqam, le répertoire canonique dont les origines sont historiquement liées à Boukhara. Au moment de sa sortie, cette édition était l’aboutissement de 13 années d’un travail de recherche et de pratique d’interprétation fidèle aux traditions historiques mené par les membres de l’Académie.
Les diplômés de l’Académie du Maqam sont aujourd’hui musiciens et enseignants de musique tadjike classique professionnels et officient dans de nombreux ensembles soutenus par l’État et dans des établissements d’enseignement supérieur. Ils ont représenté le Tadjikistan et le Réseau Aga Khan de développement (AKDN) lors d’événements diplomatiques d’importance.
En 2019, le Musée Gurminj des instruments de musique de Douchanbé a été distingué lors de la cérémonie inaugurale des Prix Aga Khan de Musique (AKMA). Organisés tous les trois ans, les AKMA ont été créés par Son Altesse l’Aga Khan en 2018 afin de reconnaître la créativité, l’engagement et les initiatives tenant de l’exceptionnel en matière d’interprétation, de création, d’enseignement, de préservation et de revitalisation de la musique dans les sociétés du monde parmi lesquelles les musulmans ont une présence significative. Le Musée Gurminj a été récompensé pour son « travail de préservation et de revitalisation du patrimoine musical des peuples et des cultures d’Asie centrale, notamment de la culture musicale du Badakhchan ».
En dehors de ses activités au Tadjikistan, l’AKMP a permis à des musiciens tadjiks de se produire dans les salles et les festivals les plus prestigieux du monde et de participer à des résidences universitaires et des masterclass. Le Badakhshan Ensemble, qui se compose de membres de l’ensemble folklorique national Pomir, affilié à l’organisation des spectacles de danse de l’ensemble Bazmoro, placé sous l’égide du ministère de la Culture du Tadjikistan, est un groupe historique du répertoire de tournées du Programme Aga Khan pour la musique. Sirojiddin Juraev, un diplômé de l’Académie du Maqam et un virtuose du dutar, du tanbûr et du sato, est l’un des membres permanents du groupe Aga Khan Master Musicians, l’ensemble du Programme Aga Khan pour la musique dans lequel se produisent les principaux artistes affiliés à l’AKMP. L’AKMP a également publié le CD solo de Sirojiddin Juraev, coproduit par Richard Wolf, professeur de musique à l’Université Harvard, qui a accueilli le musicien dans la célèbre institution dans le cadre du programme de bourses Fullbright.
Enfin, l’AKMP a soutenu le travail de recherche des ethnographes spécialisés dans la musique Chorshanbe Ghoibnazarov et Faroghat Azizova, qui font partie des 27 auteurs de 14 pays représentés dans The Music of Central Asia (La musique d’Asie centrale), un manuel de 700 pages publié par Indiana University Press (2016) largement utilisé dans les cours d’enseignement de la musique d’Asie centrale de niveau universitaire à travers le monde.