India · 20 mars 2019 · 4 min
AKDN / Christopher Wilton-Steer
L’amélioration de l’accès durable à l’assainissement et l’hygiène reste l’un des défis de développement les plus urgents en Inde aujourd'hui. En réponse à cela, le gouvernement indien a lancé Swachh Bharat Abhiyan (Clean India Mission - Mission pour une Inde propre) afin de faire disparaître la défécation en plein air d'ici 2019 dans le pays. Depuis le lancement du programme Swachh Bharat en 2014, la couverture sanitaire de l’Inde a doublé et atteint désormais les 74 %.
En 2015, afin de compléter le programme phare du gouvernement indien, le Réseau Aga Khan de développement (AKDN) a lancé son Initiative globale d’assainissement. Cette initiative se traduit en un programme de cinq ans dont le but est d’améliorer l’accès à l’assainissement et à l’hygiène pour plus de 700 000 personnes à travers six États, le Bihar, le Gujarat, le Madhya Pradesh, le Maharashtra, l’Uttar Pradesh et le Telangana. Un des éléments clés de l'initiative est d'encourager un intérêt envers de meilleures pratiques d'hygiène en s’attaquant à des normes ancestrales et en favorisant un changement de comportement sur la durée pour améliorer la qualité de vie.
En 2016, un an après le lancement de l’initiative, le Programme Aga Khan de soutien rural (AKRSP) a commencé à mener des entretiens avec les bénéficiaires afin de comprendre comment la construction de toilettes dans leurs maisons avait transformé leurs vies. Vous trouverez ci-dessous une transcription d'un entretien qui est paru à l’origine sur le site internet de la Fondation Aga Khan États-Unis (AKF USA) :
Sudhanshini Devi, 60 ans, vit avec ses deux fils et leurs familles dans le tola de Vishanpur Bakri. Ganesh Kumar, 28 ans, son fils cadet, a une petite fille. Lui et sa femme attendent un deuxième enfant. À l’occasion de Gandhi Jayanti (anniversaire de Gandhi), le 2 octobre, le gouvernement du Bihar a déclaré que la défécation en plein air avait disparu du tola de Vishanpur Bakri. Ganesh Kumar et sa mère ont fait partie des derniers à avoir construit des toilettes pour leur famille.
Ils nous racontent comment le fait d’accéder à des toilettes a transformé leurs vies.
AKRSP : Sudhanshini Devi ji et Ganesh Kumar ji, votre famille a récemment construit deux toilettes. Pourquoi avoir fait cela ?
Ganesh Kumar (GK) : Nous avons construit ces toilettes après avoir appris, il y a un an, les dangers de la défécation en plein air. Cela a commencé lorsque le personnel local de l’AKRSP est venu dans notre village afin de comptabiliser le nombre de foyers équipés et utilisant des toilettes. Au cours de cette rencontre, il est clairement apparu que la plupart d’entre nous se soulageaient à l’extérieur, même si certains avaient déjà construit des toilettes. Lors des réunions de suivi et des visites personnalisées, l’AKRSP nous a expliqué les risques sanitaires de la défécation en plein air et a suggéré que chaque foyer sans toilettes envisage la possibilité d’en construire. Lorsque ma famille a appris combien la défécation en plein air était malsaine, nous avons commencé à chercher à construire des toilettes.
AKRSP : Quels ont été les plus gros obstacles que vous avez dû surmonter pour construire ces toilettes ?
GK : Il a été difficile pour nous de rassembler suffisamment d’argent pour les construire. Mon frère et moi sommes tous deux ouvriers agricoles et n’avons pas beaucoup d’économies. Nous voulions construire des toilettes de bonne qualité et craignions que cela coûte beaucoup d’argent. L’AKRSP nous a aidés à comprendre qu’un cabinet de toilette simple pouvait être construit à un coût relativement bas et que nous pouvions demander une aide du gouvernement pour couvrir une partie des frais. Après avoir appris qu’un seul cabinet de toilette pouvait être construit pour environ 18 000 roupies (261 dollars), mon frère et moi avons décidé d’en construire deux, afin que tous les membres de notre famille puissent y aller dès qu’ils en ont besoin.
AKRSP : Cela a-t-il été compliqué de construire ces toilettes ?
GK : La construction en elle-même n’a pas été longue du tout ; cela n’a pris que quatre jours avec l’aide d'un maçon. Nous avons suivi un modèle suggéré par l’AKRSP qui convient aux zones de basse terre, comme celle où nous vivons, car les toilettes sont construites sur une plateforme légèrement surélevée. C’est un modèle simple et facile à utiliser et entretenir. Nous avons également construit des lavabos pour que chacun puisse se laver les mains après être allé aux toilettes.
AKRSP : Est-ce qu’avoir des toilettes a changé quelque chose dans vos vies ?
Sudhanshini Devi (SD) : Cela a réellement transformé ma vie. De toute ma vie, je n’avais jamais eu accès à des toilettes et avais toujours dû aller à l’extérieur pour me soulager. Lorsque j’étais jeune et que je suis plus tard tombée enceinte, il était très difficile d’aller aux toilettes, et j’attendais qu’il fasse nuit ou qu'il soit tôt le matin pour y aller, car j’étais gênée que les autres me voient. Je me souviens que lorsque j’attendais mes fils, j’étais très mal, car je ne pouvais pas aller aux toilettes aussi souvent que j’en avais besoin. Maintenant que je suis plus âgée, c’est très pratique pour moi de pouvoir aller aux toilettes juste à côté, car je ne peux plus marcher autant qu’avant. Je suis aussi heureuse que mes belles-filles et ma petite-fille n’aient plus besoin d’attendre pour aller aux toilettes, comme c’était le cas lorsque j’étais jeune.
GK : Ma mère, ma femme et ma fille disent toutes que cela a transformé leurs vies et qu’elles se sentent également plus en sécurité de ne plus avoir à marcher sur de longues distances dans l'obscurité pour aller se soulager. Pour mon frère, ses fils et moi, c’est également un soulagement d’avoir les toilettes à proximité, car nous ne perdons plus de temps pour y aller.
AKRSP : La défécation en plein air a récemment disparu de votre tola. Que ressentez-vous vis-à-vis de cela ?
SD : Je suis heureuse que cela se soit passé dans notre tola. J’ai remarqué qu'il n’y avait plus autant de mauvaises odeurs. C’est une bonne chose que tout le monde utilise des toilettes. Cela signifie que nous serons désormais en meilleure santé et aurons une meilleure hygiène.
GK : C’est une bonne chose que notre tola ait pu accomplir cela grâce à nos efforts conjoints. Tout le monde comprend désormais que déféquer en plein air est dangereux et est devenu plus conscient de son hygiène personnelle et de la propreté du village.