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Cinq raisons qui font que les mangroves sont essentielles pour la planète
Kenya · 12 septembre 2024 · 1 min
Son Altesse l’Aga Khan
Les mangroves sont des écosystèmes qui se composent d’arbres et d’arbustes résistants qui se développent dans les zones de balancement des marées. Véritables gardiennes du littoral, elles protègent nos ressources en eau et l’air que nous respirons. Bien qu’elles jouent un rôle essentiel, plus de la moitié des mangroves de la planète sont aujourd’hui menacées par l’agriculture intensive, le changement climatique et d’autres facteurs. Il est ainsi primordial d’inverser cette tendance, leur disparition pouvant entraîner la dévastation d’écosystèmes et de communautés dans leur intégralité. Heureusement, certains pays à l’image du Kenya, de Madagascar et du Pakistan ont commencé à lancer des projets de réhabilitation des zones de mangrove.
Mais pourquoi la survie des mangroves est-elle si importante ?
Dans un monde de plus en plus frappé par les phénomènes de submersion marine, les mangroves constituent un premier front de défense essentiel. Elles peuvent en effet réduire jusqu’à 70 % la hauteur d’eau en cas de submersion marine, diminuer de moitié la hauteur des ondes de cyclone et atténuer de 70 % la force des vagues, occupant ainsi un rôle de remparts qui protègent les populations et leurs moyens de subsistance.
Les microorganismes qu’elles abritent et leurs systèmes racinaires enchevêtrés typiques assurent la cohésion et la résistance du sol. Cette barrière naturelle diminue le mouvement de l’eau et donc de l’érosion du rivage. En retenant les sédiments et en stabilisant le littoral, les mangroves contribuent à l’augmentation de la surface terrestre et forment ainsi un rempart de plus contre de légères élévations du niveau de la mer.
Revue Scientific Reports
Avec une capacité de stockage du CO2 cinq fois supérieure à celle des forêts tropicales humides, les mangroves se révèlent être de puissants puits de carbone. Leur environnement salin unique produit en outre beaucoup moins de méthane que les zones humides d’eau douce, ce qui en fait des alliées essentielles dans la lutte contre le changement climatique.
Leur sol gorgé d’eau et pauvre en oxygène ralentit la décomposition de la matière organique, ce qui leur permet de séquestrer le carbone pendant des siècles, voire des millénaires. Si les mangroves existantes venaient à être détruites, on estime que six milliards de tonnes de carbone, soit l’équivalent des émissions annuelles des États-Unis, seraient libérées dans l’atmosphère.
Alors qu’elles sont source d’ombre, qu’elles augmentent l’humidité et qu’elles réduisent la pollution atmosphérique en piégeant les particules issues des procédés industriels, les mangroves profitent également aux populations locales.
Les mangroves abritent près de 800 milliards de poissons et d’invertébrés chaque année, ainsi que des oiseaux et des animaux comme des tigres au Bangladesh ou des tortues au Cambodge.
La biodiversité est un élément vital de la planète. En effet, les écosystèmes qui se composent de nombreuses plantes et de nombreux animaux présentent une meilleure stabilité et sont plus aptes à résister aux perturbations environnementales, à l’image des ravageurs ou des maladies.
Lorsque des habitats naturels tels que les mangroves sont détruits, les humains sont indéniablement plus proches de la faune sauvage, ce qui augmente les risques d’épidémie de zoonoses. Des écosystèmes sains nous protègent ainsi des agents pathogènes et réduisent la probabilité de pandémies comme celles de COVID-19 et d’Ébola. Protéger les mangroves n’est ainsi pas seulement une question de sauvegarde de l’environnement, mais de santé publique mondiale.
Les stations d’épuration, le ruissellement d’engrais dans les cours d’eau et le lessivage des sols agricoles sont autant de facteurs qui peuvent provoquer des efflorescences algales. Ce phénomène se traduit par la formation de zones toxiques d’eau colorée qui épuisent l’oxygène et tuent ainsi la faune et la flore marine qui s’y développent en temps normal.
Dans ce contexte, les mangroves agissent comme des systèmes naturels de traitement des eaux. Elles absorbent l’azote, le phosphore et d’autres facteurs de prolifération excessive d’algues d’origine humaine et naturelle.
Les microorganismes qui se développent autour de leurs racines décomposent les polluants tels que les métaux lourds contenus dans certains pesticides et engrais. En outre, la densité de ces systèmes racinaires empêche le ruissellement de débris vers la mer et protège ainsi la faune marine. Les récifs coralliens et les herbiers marins situés à proximité des mangroves se développent mieux et améliorent considérablement la santé environnementale, alors qu’ils favorisent la biodiversité, séquestrent le carbone et offrent une protection supplémentaire et de nouvelles perspectives économiques aux populations humaines.
Les arbres de mangrove fournissent des ressources précieuses : bois de construction, combustible, charbon, fruits et remèdes médicinaux. Leurs tanins sont utilisés pour la fabrication de teintures et le traitement du cuir, tandis que les roseaux qui s’y développent peuvent être tressés en sacs ou en nattes. Leurs systèmes racinaires abritent de nombreuses espèces de poissons et de crabes. Alors que les abeilles forment des ruches dans leurs branches, le bétail peut se nourrir du fourrage qui est tiré des différents végétaux qu’on y trouve.
D’un point de vue économique, les mangroves atténuent les conséquences post-cyclone, alors qu’on estime qu’elles permettent d’éviter plus de 65 milliards de dollars de dommages matériels chaque année.
Les mangroves sont également des destinations touristiques qui soutiennent l’économie locale, et des activités de tourisme nautique et d’observation de la faune sauvage locale y sont régulièrement organisées. Dans le Gujarat, en Inde, des femmes ont collaboré avec la Fondation Aga Khan (AKF) pour reboiser 20 hectares de terres et les utiliser pour la production durable de fourrage et de combustible. À Cabo Delgado, au Mozambique, des femmes sont formées à l’apiculture, à la restauration de mangroves et à la finance dans le cadre du programme « Mel do Mar » de l’AKF. Ces femmes bénéficient en outre d’un accompagnement pour commercialiser le miel récolté des ruches et constituer des groupes d’épargne.
Les mangroves sont devenues un atout économique dans notre ère moderne. Au Kenya, les habitants de la baie de Gazi restaurent et protègent suffisamment de mangroves pour gagner 12 000 dollars par an en crédits carbone, qu’ils réinvestissent dans des projets locaux d’éducation et de santé. Le Pakistan, qui a triplé ses zones de mangrove au cours des 30 dernières années, devrait gagner 12 milliards de dollars en crédits carbone d’ici à 2075.