Fondation Aga Khan
Syrie · 18 septembre 2025 · 4 min
AKF
Lorsqu’elles ont pris part à un atelier de formation en design centré sur l’humain organisé par la Fondation Aga Khan (AKF), Noor, Riam, Yemar, Riam et Hadeel étaient loin d’imaginer qu’elles en sortiraient cheffes d’entreprise.
« La formation mettait l’accent sur la génération d’idées pour résoudre des problèmes au sein de notre communauté. À la fin de la formation, nous avons imaginé un projet pour améliorer les conditions de vie à Salamieh en optimisant les services de livraison », explique Riam. « Notre entreprise de livraison, Wassel, propose des tarifs compétitifs et utilise des véhicules écologiques fonctionnant uniquement à l’électricité. »
L’équipe de Wassel a participé à deux appels à subvention de l’AKF, la première ayant servi à financer l’achat de trois tuk-tuks, d’un système solaire et de mobilier de bureau. Lorsque le système solaire s’est avéré insuffisant pour recharger les véhicules très sollicités, la deuxième subvention a permis d’en augmenter la capacité.
L’année suivante, Wassel a présenté ses projets à un panel d’investisseurs et a décroché un financement destiné à une batterie au lithium et à des moteurs électriques. L’entreprise emploie désormais une équipe de cinq jeunes chauffeurs.
Ces cinq femmes gèrent une entreprise de livraison de marchandises, soutenues par la formation et le financement de la Fondation Aga Khan.
AKF
La première subvention de Wassel a été accordée dans le cadre du Programme dédié aux micro‑entreprises à vocation humanitaire (HME). Abdulaziz Ajjoub, coordinateur de projets de l’AKF, raconte : « Nous offrons aux entreprises de taille moyenne, petite et micro dans différentes régions de Syrie un programme de formation intensif, suivi d’un financement mixte, comprenant à la fois un prêt à taux préférentiel et une subvention non remboursable.
« Nous sélectionnons des entreprises qui disposent déjà d’un modèle économique opérationnel, dirigées par des fondateurs dont d’autres personnes dépendent pour leur subsistance, afin de toucher un maximum de personnes, en moyenne une famille de quatre à cinq personnes. »
Dans le cadre du programme HME, les futurs propriétaires de micro et petites entreprises à Tartous suivent une formation en planification financière, marketing et élaboration d’études de faisabilité économique.
AKDN / Ali Shaheen
Le programme débute par une analyse des besoins, au cours de laquelle entrepreneurs, fournisseurs et représentants de la communauté locale identifient les insuffisances dans les métiers du marché local. Le programme a soutenu de nombreuses entreprises traditionnelles telles que des salons de coiffure, forges, ateliers de menuiserie, petites manufactures et ateliers de couture, et se concentre désormais sur des initiatives innovantes produisant des biens destinés au marché local.
« Nous avons accompagné Sugar Free, une entreprise créée par Zainab, une femme déterminée et pourvoyeuse principale pour sa famille. Atteinte de diabète, elle aimait les sucreries, mais ne pouvait pas en manger. Elle a donc créé des cookies et cupcakes sains, conçus pour répondre à ses besoins alimentaires. Ils ont rencontré un franc succès sur le marché », déclare Abdulaziz.
Zainab fait vivre sa famille grâce à sa pâtisserie saine.
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Les participants consacrent deux jours à améliorer leurs compétences en gestion et suivi financier pour mieux gérer leur entreprise, une journée à collecter des données et analyser les prix sur le marché, puis deux jours à rédiger une étude de faisabilité. « L’étude n’est pas utile uniquement pour nous, elle aide aussi l’entrepreneur ou l’entrepreneuse à savoir si son projet mérite d’être financé.
Chaque année, 1 000 entrepreneurs sont formés et 500 bénéficient d’un financement grâce au programme HME.
« En moyenne, nous formons chaque année 1 000 entrepreneurs depuis plusieurs années et nous accordons un financement à la moitié d’entre eux. Nous soutenons actuellement près de 500 entreprises, ainsi qu’une cohorte de 25 financée par le HCR. Cette année, nous intervenons dans les zones rurales de Damas, Homs, Hama, Tartous, Lattaquié et Alep. »
La deuxième subvention de Wassel a été accordée par Accelerate Prosperity (AP), une initiative de l’AKDN qui aide les entrepreneurs à lancer ou développer leurs entreprises. AP est actif en Syrie depuis 2023, en partenariat avec la Fondation Sanad pour le développement des jeunes.
Le programme d’incubation Launch Up de l’initiative AP vise à aider 170 entrepreneurs en herbe et start-ups à maximiser leurs chances de réussite.
AKDN / Ali Shaheen
Ciblant les entreprises ou start-ups à forte composante technologique, innovantes et à fort potentiel de croissance, il propose des programmes de formation en incubation ou en accélération d’une durée de trois mois. Launch Up soutient les entrepreneurs dès le démarrage de leur activité, en les aidant à créer des réseaux et à accéder aux marchés. La phase d’accélération, destinée aux entreprises technologiques, couvre la création de modèles économiques, le marketing avancé, l’analyse financière, le réseautage avec les investisseurs, ainsi que le perfectionnement des compétences en présentation et en argumentation commerciale. « Nous les accompagnons pas à pas pour les aider à surmonter les défis auxquels ils sont confrontés », explique Abdulaziz.
La plupart de ces entreprises sont dirigées par des jeunes et proposent des solutions innovantes pour répondre aux problématiques de leur communauté : santé, transport et livraison. Environ la moitié sont dirigées par des femmes.
Les projets les plus performants bénéficient d’un prêt sans intérêt et sans garantie pouvant atteindre 10 000 $, ainsi que de subventions d’assistance technique. En 2023 et 2024, 56 entreprises ont été soutenues, bien que les perturbations actuelles, notamment la pénurie de billets, aient suspendu les financements.
Un exemple est Professor, un site Web et une application pour les élèves de terminale, qui propose des vidéos de professeurs couvrant l’intégralité du programme du Baccalauréat. Elle constitue une alternative à un professeur particulier, voire à l’école elle-même. Abdulaziz souhaite que ce projet bénéficie aux communautés marginalisées, privées d’accès à l’éducation.
À l’échelle de la planète, seulement 48 % des femmes sont intégrées à la population active, contre 75 % des hommes.
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Wassel
Soutenir les femmes pour accroître leur capacité à générer des revenus est au cœur de l’approche de développement des entreprises de l’AKF. L’égalité des genres n’est pas considérée uniquement comme une question de droits humains, mais aussi comme une démarche économique intelligente : pour qu’une communauté prospère, le potentiel de chacun de ses membres doit être mis à profit.
Un groupe de femmes photographes a créé une entreprise à Hama spécialisée dans les cérémonies de mariage côté femmes, traditionnellement inaccessibles aux photographes masculins. Elles prévoient d’utiliser le matériel supplémentaire et les drones fournis par l’initiative AP pour étendre leur activité au-delà de Hama.
Wassel montre comment l’entrepreneuriat peut créer des emplois, offrir un service essentiel et redéfinir l’avenir. « À travers notre expérience dans ce projet, nous souhaitons adresser un message à toutes les jeunes femmes ambitieuses », déclare l’équipe. « Croyez en vos rêves, ne baissez pas les bras, car les rêves peuvent devenir réalité. »