Université d'Asie centrale
République kirghize · 22 septembre 2025 · 4 min
UCA
Dans la petite ville montagneuse de Naryn, les diplômés de la SPCE de l’UCA donnent vie à leurs projets en créant des entreprises et deviennent ainsi acteurs du changement. Qu’il s’agisse d’ateliers de maroquinerie, de maisons d’hôtes familiales ou d’entreprises sociales produisant des tisanes, ces initiatives permettent non seulement de créer des revenus, mais aussi de générer des emplois, de préserver les traditions culturelles et de construire un avenir plus durable pour la communauté.
Depuis sa création en 2006, la SPCE a formé plus de 260 000 personnes en Asie centrale, en leur offrant des compétences en entrepreneuriat, gestion, informatique et métiers techniques dans ses 17 centres d’apprentissage. Voici comment certains d’entre eux mettent ces compétences en pratique.
Erzhan Tolobek uulu est passionné par la maroquinerie depuis son enfance. Diplômé du Collège d’Art Chuykov en arts décoratifs et appliqués, il a démarré sa carrière à l’usine de cuir Ak-Maral, où il a affiné son savoir-faire et approfondi sa maîtrise de la maroquinerie. Il est ensuite retourné à Naryn pour monter sa propre entreprise et transmettre son savoir-faire à la communauté. Erzhan a ouvert, avec ses parents et son frère cadet, un atelier de maroquinerie spécialisé dans les selles de cheval traditionnelles.
Grâce au cours d’entrepreneuriat de la SPCE, il a acquis des compétences pratiques en gestion d’entreprise et obtenu une subvention de 5 000 $. Cette somme lui a permis d’acheter les outils et équipements nécessaires. Aujourd’hui, l’atelier fabrique des selles, des sacs et des accessoires, souvent ornés de motifs kirghizes complexes qui rendent hommage aux traditions des éleveurs nomades de la région.
Pour Erzhan, la maroquinerie n’est pas seulement une activité commerciale : c’est une manière de faire vivre l’héritage de ses ancêtres et d’inciter les jeunes artisans à perpétuer les traditions.
Salina Kassam
« La formation m’a donné les moyens de convertir mon art en marque. Je bénéficie désormais d’une forte visibilité sur les réseaux sociaux et j’attire des clients de toutes les régions du pays. » Pour lui, travailler le cuir ne se résume pas aux articles fabriqués et vendus. « Les métiers d’art nous rapprochent de notre passé, préservent les traditions et les valeurs de nos ancêtres, et permettent à notre identité de perdurer », explique-t-il.
Erzhan ne se contente pas de préserver une tradition, il crée également des opportunités pour l’avenir. Son atelier est un lieu où le savoir se transmet du maître à l’apprenti, préservant les secrets de l’artisanat et les méthodes traditionnelles de travail du cuir. Aujourd’hui, il emploie des habitants locaux, dont des membres de sa famille et des artisans de la région, tout en formant les jeunes aux savoir-faire traditionnels et en contribuant à la préservation du patrimoine culturel kirghize.
L’idée d’ouvrir une maison d’hôtes est venue à Aiganysh Taalaibek kyzy pendant la saison touristique de 2018, peu de temps après le déménagement de sa famille à Naryn. Face à la pénurie d’hôtels, les voyageurs ont commencé à loger chez elle, ce qui lui a inspiré la création de son activité.
« J’avais beaucoup de doutes », se souvient-elle. « La SPCE m’a apporté des compétences pratiques en marketing, en gestion financière et en planification d’entreprise. Cela m’a permis de transformer un rêve en étapes concrètes. »
Au départ simple maison familiale, l’hébergement est devenu un véritable centre culturel à Naryn, accueillant les visiteurs et soutenant les artisans et agriculteurs locaux.
Salina Kassam
À ses débuts simple maison d’hôtes, l’hébergement s’est rapidement imposé comme un centre culturel. Aujourd’hui, c’est un lieu où les visiteurs partagent repas, histoires et traditions avec les habitants. « Chaque détail reflète notre culture, ce qui en fait moins un hôtel et davantage un foyer où chaque invité peut vivre une histoire », explique Aiganysh.
La maison d’hôtes s’approvisionne auprès d’agriculteurs locaux, soutient les artisans, propose des excursions dans la région et met en avant des initiatives locales. La durabilité influence autant ses pratiques quotidiennes que sa vision à long terme : des habitations écologiques, des ateliers créatifs et des espaces culturels où les visiteurs peuvent se détendre et trouver l’inspiration.
« La SPCE m’a apporté des compétences pratiques en marketing, en gestion financière et en planification d’entreprise. Grâce à cela, j’ai pu concrétiser mon rêve », confie Aiganysh.
Salina Kassam
Ces dernières années, le tourisme à Naryn s’est progressivement développé, avec l’ouverture de nouveaux cafés, l’amélioration des routes et l’apparition de petits services. La maison d’hôtes d’Aiganysh s’inscrit dans cette dynamique, offrant aux visiteurs une immersion dans la culture et la vie de la communauté. Ce qui la réjouit le plus, c’est de voir la culture renaître. « Les gens accordent désormais plus de valeur à l’artisanat, à la gastronomie et au folklore. Les populations locales souhaitent aujourd’hui préserver leurs traditions plutôt que de les voir disparaître. »
Aujourd’hui, la maison d’hôtes accueille régulièrement des étudiants, des enseignants et des chercheurs de l’UCA. Pour Aiganysh, son plus grand succès réside dans sa capacité à rassembler les gens grâce à la culture.
À 63 ans, Sharapat Aktanova dirige Kadam, un centre de réhabilitation pour personnes en situation de handicap à Naryn. Engagée pour sa communauté, elle a noué des partenariats et obtenu des financements pour améliorer les services du centre.
Parmi ses initiatives les plus marquantes figure Arpa Chai, une entreprise sociale spécialisée dans la production de thé d’orge naturel exporté vers le Japon et la Corée. Tout a commencé en octobre 2021, lorsque des représentants de l’Agence japonaise de coopération internationale ont formé cinq membres de son organisation à la préparation du mugicha, un thé d’orge traditionnel. Convaincue de ses vertus pour la santé, elle a décidé de se lancer dans sa production.
De la préparation au conditionnement, en passant par la torréfaction, l’équipe d’Arpa Chai valorise l’orge locale en la transformant en une véritable source de revenus et de fierté.
Salina Kassam
Pour faire d’Arpa Chai bien plus qu’une simple initiative locale, Sharapat et son équipe se sont inscrites au cours d’entrepreneuriat de la SPCE. Là, ils ont appris à élaborer un plan d’affaires, à promouvoir leurs produits en ligne et à attirer des financements. En 2024, le Programme de développement durable de Naryn de l’UCA leur a accordé une subvention pour de nouveaux équipements, leur permettant d’élargir la production.
Aujourd’hui, l’entreprise emploie quatre parents d’enfants en situation de handicap et deux femmes en situation de handicap. Des bénévoles et d’autres personnes intéressées y participent également. Tous ensemble, ils gèrent l’intégralité du processus de production, du nettoyage à la torréfaction jusqu’au conditionnement, et donnent ainsi à l’orge locale une valeur nouvelle : celle d’une source de revenus.
Sharapat et son équipe souhaitent développer davantage d’emplois, notamment pour les personnes en situation de handicap, et faire rayonner Arpa Chai sur les marchés internationaux.
Salina Kassam
Fabriqué exclusivement à partir d’orge locale, sans additifs chimiques, le thé Arpa Chai est à la fois respectueux de l’environnement, riche en vitamines et reconnu pour ses vertus digestives. Depuis 2022, Arpa Chai est commercialisé dans des hôtels et des magasins à Naryn et à Bichkek. L’entreprise a depuis reçu des prix régionaux et nationaux pour son image de marque, et obtenu des financements pour accroître sa production.
Sharapat et son équipe ont pour ambition de créer davantage d’emplois, notamment pour les personnes en situation de handicap, et de faire rayonner Arpa Chai sur les marchés internationaux.