par M. Firoz Rasul, Karachi, Pakistan · 19 décembre 2013 · 8 min
Son Excellence, Dr Ishrat Ul Ebad Khan, Gouverneur du Sindh,
Son Excellence, Qaim Ali Shah, Premier ministre du Sindh,
Son Altesse l'Aga Khan, chancelier de l’Université,
Monsieur le président intérimaire, Dr Robert Buchanan, et membres du conseil d'administration,
Monsieur le recteur, Dr Greg Morgan,
Chers doyens, membres du corps enseignant et du personnel de l’Université,
Chers parents, partisans et invités d'honneur,
Et par-dessus tout, chers futurs diplômés,
Assalam Alaikum (que la paix soit sur vous) et bonjour.
Bienvenue à tous à cette cérémonie de remise des diplômes de l'Université Aga Khan de 2013.
La cérémonie de cette année revêt une importance particulière, car nous célébrons aujourd'hui le 30e anniversaire de l’obtention de la charte de l’AKU, la remise des diplômes de la 30e promotion de l’École d'infirmières, la remise des diplômes de la 25e promotion de l’École de médecine, le 20e anniversaire de l’Institut pour le développement de l’éducation (IED) et le 10e anniversaire du Comité d'examen de l’AKU.
Voilà une journée qui marque le passage de nombreuses étapes, une journée de célébrations.
Chers futurs diplômés, ce sont avant tout vous et vos réalisations qui nous rassemblent aujourd’hui. Nous avons été très exigeants avec vous, et vous avez prouvé que vous étiez à la hauteur de chacun des défis que vous avez rencontrés. Au nom de toutes les personnes présentes aujourd'hui, je vous félicite. Je sais que dans les années à venir, vous allez rendre cette Université, vos familles, vos communautés et votre nation extrêmement fières.
Tout d’abord, je voudrais adresser quelques vifs remerciements : aux membres du corps enseignant et du personnel pour leur engagement en faveur de la réussite de nos étudiants, de l’activité de l’Université et de nos recherches, à nos donateurs pour leur soutien indéfectible, aux agences donatrices internationales pour leur soutien financier et leur partenariat visant à améliorer la qualité de vie des personnes que nous aidons, à nos partenaires universitaires du monde entier pour leur volonté à collaborer en faveur du développement des connaissances et, enfin, au gouvernement, qui cherche à stimuler et développer les possibilités en enseignement supérieur dans cette province et ce pays.
Une cérémonie de remise des diplômes est un moment où il est important de prendre quelques instants pour regarder en arrière et voir tout ce qui nous a amenés à cette journée, mais aussi de nous tourner vers l’avenir et vers la concrétisation de nos ambitions. C'est un moment où il est important de reconnaître l’excellence individuelle et les investissements communs, deux facteurs qui ont aidé chacun de nous à s’épanouir. Cette journée nous offre un moment de répit pour nous recentrer au milieu du rythme effréné de la vie.
Alors que nous jetons un regard sur le passé, le présent et l’avenir, une conclusion s'impose alors : notre monde évolue à une vitesse incroyable. Il n’est pas besoin d’avoir atteint un grand âge pour réaliser que le monde de notre jeunesse est méconnaissable. Et lorsque nous nous tournons vers l’avenir, une chose semble alors inéluctable : cet avenir sera aussi différent du présent que le présent l’est du passé.
Lors d'une journée telle que celle-ci, dans un monde tel que celui-ci, il est parfaitement naturel de se demander comment aborder les immenses défis qui nous font face et saisir les occasions pas moins extraordinaires qui se présentent à nous.
Ma réponse serait la suivante : en s’efforçant jour après jour d’aider nos sociétés à créer de meilleures conditions de vie pour tous au milieu de ce changement insaisissable.
Sur une planète en pleine mondialisation, le changement est inévitable et se retrouve à chaque coin de rue. Que ce soit pour le meilleur ou pour le pire, qu’il s’agisse d'un changement de notre part ou de la part d'une autre personne, que nous soyons ses maîtres ou ses serviteurs, tout dépend de la façon dont nous agissons - comme meneurs, disciples ou spectateurs.
Il est évident que le leadership nécessite de nombreuses compétences et traits de caractère. Il est nécessaire d’être profondément investi dans une discipline, mais aussi d’être très instruit et capable d’aborder les problèmes sous différents angles, de faire des analyses incisives, de communiquer clairement, d’avoir une importante conscience sociale, d'incarner les plus hautes normes éthiques, d'inspirer le meilleur chez les autres et de comprendre que la diversité de l’humanité est également l'une de ses plus grandes forces.
Toutefois, de telles compétences, même si elles sont indispensables, ne se suffisent pas à elles-mêmes. Au cœur de la notion de leadership réside un grand désir d'accomplir ce qui n'a jamais été fait auparavant, et la prise en charge volontaire de la réussite des autres.
Mais aujourd'hui, il y a une autre caractéristique qu'un leader doit posséder : la conviction que la quête du savoir par la recherche intellectuelle est la clé du progrès.
Malheureusement, dans le monde musulman, cette conviction a semblé moins importante ou centrale au cours des dernières décennies. Mais cela n'a pas toujours été le cas. Pendant la plus grande partie de leur histoire, les sociétés musulmanes furent à la pointe de la science et de l’innovation.
En mathématiques, par exemple, dans une longue liste qui remonte au 8e siècle, nous pourrions citer Al-Khwarizmi, dont le nom évoque la notion d’algorithme et dont les travaux ont introduit l’algèbre (ou al-jabr) en Europe, Al-Khayyam, qui a fait de nombreuses découvertes importantes en algèbre et en géométrie, et al-Buzjani, un pionnier de la trigonométrie. En médecine, nous pourrions évidemment citer Ibn Sina, connu en Occident sous le nom d’Avicenne, et dont le Canon de la médecine fut pendant plus de cinq siècles l’un des ouvrages médicaux les plus influents du monde. Nous pourrions également mentionner Ibn al-Nafis, qui fut le premier à décrire la circulation pulmonaire.
Certains penseront aussi à Ibn Rochd, plus connu sous le nom d’Averroès en Occident, un commentateur extrêmement influent d’Aristote. Nous pourrions également évoquer l’astronome Al-Biruni qui, au 11e siècle, a prouvé dans un esprit résolument moderne que l’observation et les mathématiques réfutaient la physique d’Aristote.
Si j’attire aujourd'hui votre attention sur ce passé glorieux, ce n’est pas pour m’attarder sur sa disparition, mais pour prouver qu’un avenir encore plus radieux est possible. C’est précisément pour paver la voie vers cet avenir que l’AKU a été fondée.
Nous pouvons aujourd'hui mentionner de nombreux exemples de notre réussite.
La Commission de l'enseignement supérieur du Pakistan a de nombreuses fois classé l’AKU première université médicale du pays. Nous exploitons désormais au Pakistan et en Afrique les seuls centres hospitaliers universitaires accrédités par la Joint Commission International américaine, la référence internationale en matière d'accréditation de la qualité des hôpitaux.
L’expérience de l’AKU en matière de recherche transparaît dans la confiance que nous accordent des institutions et des organisations internationales. Au cours des dernières années, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a donné à notre corps enseignant un rôle majeur dans l’élaboration d'un accord international concernant des interventions de la plus haute importance en matière de réduction des décès maternels et infantiles : un plan d’action mondial visant à lutter contre plusieurs maladies infantiles majeures, un cadre de travail international pour favoriser les investissements en faveur du développement humain, et l’élaboration de lignes directrices internationales concernant le recours aux agents sanitaires communautaires et intermédiaires pour améliorer la santé de tous.
Par leurs actions, le gouvernement national et les administrations provinciales du Pakistan ont montré qu'ils considéraient l’AKU comme une source essentielle de connaissances. L’Institut pour le développement de l’éducation a joué un rôle important dans l’élaboration de la politique d'éducation nationale et la réforme de la formation des enseignants, mais a aussi contribué à l’amélioration de plusieurs institutions de formation des enseignants et au renforcement des capacités d’universités publiques. Notre École de médecine et notre École d'infirmières et de sages-femmes ont été choisies pour contribuer à l’amélioration d’écoles de médecine et d’infirmières publiques, tandis que notre propre programme en sciences infirmières a servi de modèle pour l’élaboration du programme national en sciences infirmières. Le Comité d'examen de l’AKU a été récemment commissionné afin d’échafauder une nouvelle formation qui permettra aux futurs enseignants de 19 universités du Pakistan de mettre en œuvre des méthodes d’évaluation et d’examen efficaces.
Comme tous ces exemples l'illustrent, à l’AKU, nous croyons que de véritables leaders s’efforcent d’aider les autres à exploiter tout leur potentiel.
Mais la meilleure preuve de notre leadership reste peut-être l’expérience de nos anciens élèves. À travers tout le Pakistan et dans de nombreux autres pays, ils montrent la voie à suivre.
Nos diplômés en sciences infirmières dirigent de nombreuses écoles d’infirmières au Pakistan et sont également responsables des soins infirmiers dans plusieurs hôpitaux. Les diplômés de notre École de médecine ont permis la mise en place de nouvelles disciplines au Pakistan, telles que la médecine d'urgence, tout en élevant les normes dans beaucoup d’autres. Chaque jour, des vies sont sauvées grâce à leur travail. Si l’Institut pour le développement de l’éducation a été influent et efficace dans l’amélioration du niveau de l’éducation, c’est en grande partie grâce aux nombreux anciens élèves qui font désormais partie de son corps enseignant et qui occupent des postes universitaires et de direction de haut niveau au sein des systèmes éducatifs publics et privés.
Chers futurs diplômés, vous vous apprêtez à entrer dans cette famille de plus de 10 000 médecins, infirmières et enseignants qui ont été formés à l’AKU et dont le travail fait aujourd'hui une grande différence.
Vous êtes tous passés de nombreuses fois au travers des portails de marbre de nos campus, dont la grandeur reflète l’importance de la quête du savoir. Désormais, vous vous tenez au seuil d'un portail qui n’est pas visible, mais qui est bien plus extraordinaire que ceux qui nous entourent : il s’agit du portail vers le monde lui-même.
Il y a un quart de siècle, une jeune femme était assise à votre place. Son histoire a récemment été racontée dans les pages de l’une des plus grandes revues et publications médicales internationales. Élève de la première promotion de notre École de médecine, elle a écouté, comme vous êtes sur le point de le faire, notre chancelier. Elle a entendu son appel à agir en faveur de l’humanité et ne l’a jamais oublié. Après avoir poursuivi sa formation dans certaines des meilleures institutions occidentales, une formation qui, entre parenthèses, est désormais dispensée ici à l’AKU, elle est revenue dans son pays et dans son alma mater. La Dre Anita Zaidi est depuis devenue l’une des plus grandes professionnelles du Pakistan dans le domaine de la médecine pédiatrique. Vous êtes beaucoup à avoir bénéficié de son expérience. Je la mentionne aujourd'hui en raison de l’opportunité de son dernier projet. Pas plus tard que la semaine dernière, elle a été sélectionnée parmi 550 candidats venant de 70 pays pour recevoir une subvention d'un million de dollars afin de lutter contre la mortalité infantile dans le village de pêcheurs de Rehri Goth.
Il existe de nombreux autres exemples extraordinaires comme celui-ci parmi nos anciens élèves. Je vous encourage vivement à emprunter la même voie que tous nos diplômés qui travaillent à l’amélioration de la vie des autres. Je vous encourage vivement à garder à l’esprit l’exemplarité de cette Université, qui a été fondée avec l’espoir que ses élèves œuvrent en faveur de toute l'humanité. Je vous encourage vivement à rester en contact avec votre Université, afin que vous puissiez ensemble travailler à la concrétisation des objectifs posés par notre fondateur.
Aujourd'hui, nous sommes profondément honorés d’avoir à nos côtés la personne exceptionnelle qui a créé cette institution.
Lors de l’inauguration de l’AKU il y a 30 ans, notre chancelier déclara, et je cite : « Faire d'une nouvelle université un centre d’apprentissage efficace et respecté exige beaucoup plus d’engagement et de temps que ce qu'un homme peut consacrer en termes de ressources et de temps dans toute sa vie. »
C’est un fait. À cette même occasion, il ajouta, et c’est aussi un fait : « Lorsqu'une équipe d’alpinistes s’attaque à une montagne, il y a inévitablement un leader qui ouvre la voie pour les autres, aussi compliqué que cela puisse être. »
Mesdames et Messieurs, je vous invite à vous joindre à moi pour accueillir notre chancelier, Son Altesse l'Aga Khan, qui nous a menés au sommet sur lequel nous nous trouvons aujourd'hui et qui n’a jamais perdu de vue les sommets encore plus hauts qu'il nous reste à surmonter.
Merci !