par Son Altesse l'Aga Khan, Berlin, Allemagne · 15 janvier 2019 · 3 min
Bismillah-ir-Rahman-ir-Rahim
Monsieur le Ministre d'État, Niels Annen,
Professeur Dr Joachim Nagel,
Chers membres du parlement,
Mesdames et Messieurs,
C'est un plaisir pour moi de célébrer aujourd'hui le partenariat spécial qui unit l'Allemagne et le Réseau Aga Khan de développement, ou AKDN. Au cours des 25 dernières années, nous avons investi ensemble près de 600 millions d'euros dans des programmes en Asie et en Afrique dans les domaines de l'énergie propre et des infrastructures, de l'approvisionnement en eau et de l'assainissement, des services financiers et du tourisme, mais aussi de l'éducation, de la santé et de la société civile.
Dans tous ces projets, notre relation avec la banque de développement KfW et la DEG est primordiale. Et bien que l'AKDN ait également coopéré avec la plupart des acteurs du développement allemands, j'aimerais remercier tout particulièrement le Bureau des affaires étrangères allemand et le Ministère fédéral allemand de la coopération économique et du développement, ou le BMZ, pour leur soutien capital.
Ce soir, nous sommes réunis pour faire honneur à nos réalisations et à nos engagements communs en Afghanistan et pour évoquer les enseignements que nous en avons tirés et qui pourraient être reproduits dans d'autres contextes de fragilité ou de crise.
L'ampleur du partenariat global de l'AKDN avec l'Allemagne est représentée dans cette vaste coopération en Afghanistan. Ensemble, nos institutions ont renforcé la connectivité régionale grâce à des infrastructures transfrontalières, ont amélioré le secteur de la santé par le biais de partenariats public-privé et ont restauré le riche patrimoine culturel afghan dans les jardins de Bagh-e Babur et Chihilsitoon. Elles travaillent désormais à la revitalisation des berges de la rivière à Kaboul.
Nous avons également mis en œuvre un programme novateur de petits projets infrastructurels menés par les communautés afin d'encourager les populations locales à prendre en main leur propre développement. Le Programme de stabilisation pour le nord de l'Afghanistan (SPNA) a servi de tremplin à la conférence d'aujourd'hui et à l'échange de ce soir. En consultation avec les communautés, plus de 100 millions d’euros ont été investis dans 430 projets répondant aux besoins que les populations locales avaient identifiés comme étant les plus indispensables. Ces projets permettent de construire plus que des infrastructures : ils permettent de restaurer la confiance et de renforcer la légitimité du gouvernement ainsi que la participation citoyenne.
Ils constituent les éléments essentiels à la stabilité au sein d'un pays, et tout particulièrement dans les régions fragiles. C’est la marque de fabrique de l'approche de l'AKDN, que nous avons développée dans des régions comme le nord du Pakistan, le Tadjikistan ou l'Afghanistan post-conflit, mais aussi la Syrie, le Mozambique et d'autres pays.
De cette expérience dans la stabilisation d'une région, nous avons retenu trois éléments essentiels :
La première leçon clé est de se concentrer à l'échelle locale. Lorsque les conditions nationales ne sont pas favorables, et elles le sont rarement dans des situations fragiles ou de conflit, des changements importants surviennent souvent plus rapidement à l'échelle locale, ce qui permet d'accroître rapidement la crédibilité et la confiance.
La deuxième leçon est qu'un engagement en faveur du pluralisme est essentiel. Les discussions doivent se faire de la manière la plus large possible et toute personne présente dans une communauté doit pouvoir y participer. J’ai appris cela en tant qu’imam des musulmans chiites ismailis, fonction que j’exerce depuis plus de soixante ans, et dans laquelle j’ai la responsabilité du bien-être spirituel et matériel des membres de mon Jamat, mais de façon plus importante encore dans ce contexte, des communautés parmi lesquelles ils vivent, quelles que soient leur foi ou leurs convictions.
Enfin, nous aimerions souligner l'importance vitale de la société civile, qui désigne l’ensemble des organisations privées conçues pour atteindre des objectifs publics. De telles institutions représentent des facteurs de stabilisation et des points de continuité, là où la sécurité est fragile et les politiques instables. Il est par conséquent essentiel d’investir dans ces institutions en collaboration avec l'État.
Je suis impatient de découvrir les discussions et les réflexions de ce soir sur ces sujets importants.
Le monde a plus que jamais besoin du rôle de leadership structuré et pragmatique de l'Allemagne. A l’heure où elle réfléchit à l'avenir de son engagement en Afghanistan et à la nature de son implication dans d'autres régions du monde, j'espère que l’Allemagne s'appuiera sur ces principes qui ont guidé notre coopération pendant tant d'années : encourager la participation locale, favoriser le pluralisme et renforcer les institutions de la société civile.
Merci beaucoup.