Ce soir, ce Prix pour une citoyenneté globale reconnaît et rend hommage à Son Altesse l'Aga Khan, dont la vie entière témoigne d'un engagement constant et inébranlable en faveur des idéaux d'appartenance et d'inclusion. Par ses paroles, par ses actes et par les résultats obtenus par les institutions qu'il a fondées, encouragées et nourries, il est devenu une lumière dans une grande partie de l'obscurité conflictuelle de notre monde. C'est une personne qui a toujours encouragé la réflexion et le dialogue, ainsi que les approches pratiques et la mise en place de stratégies permettant de passer outre les obstacles, afin de contribuer à changer les mentalités et, au bout du compte, renforcer les principes de respect et de compréhension.

Ce prix est très important pour moi, car je suis arrivée dans ce pays à l'âge de deux ans et demi en tant que réfugiée de guerre sur un navire de la Croix-Rouge, et toute ma vie au Canada a été étayée par les principes que Son Altesse l'Aga Khan incarne et qui élèvent notre conscience jour après jour.

Au cours de ses presque 60 ans de leadership au sein du peuple ismaili, Son Altesse s'est rendu compte qu'il ne peut y avoir de véritable développement sans la condition préalable d'une société civile saine. Seule la force d'une société qui se préoccupe de ses populations rurales, qui sont souvent géographiquement isolées, et de la misère de ses populations urbaines démunies, qui sont totalement marginalisées, peut permettre cela. Ce sont ses efforts pour leur apporter l'égalité, la sécurité, des perspectives d’avenir et un traitement humain que nous honorons en le reconnaissant comme un citoyen du monde.

Son Altesse l'Aga Khan est entièrement dévoué au principe du pluralisme. Et son engagement a eu un effet omniprésent au cours de la dernière décennie, en particulier pour faire comprendre au monde entier ce qu'est le pluralisme, et que ce principe est aussi important que les droits de l'homme pour étayer la paix, la démocratie et une meilleure qualité de vie. Son Altesse n'a cessé de souligner que la gestion du pluralisme, son instauration en tant que valeur pure, est essentielle pour la compréhension pacifique et harmonieuse. Il souligne également que le pluralisme n'est pas le fruit du hasard, mais le produit d'une instruction éclairée, d'investissements moraux et matériels de la part des gouvernements et de la reconnaissance par les êtres humains que nous partageons tous une humanité commune. Et surtout, de la conscience qu'aucun être humain n'est plus humain qu'un autre.

Son Altesse est le fondateur inspirant d'universités et d'écoles, car l'éducation est l'un des piliers démocratiques dont il est un fervent défenseur. Il nous rappelle que l'éducation n'est pas simplement la valorisation d'engagements dogmatiques ou de choix idéologiques. Il insiste toujours sur le fait qu'une solution scientifique aux problèmes doit s'accompagner d'une ouverture continue aux nouvelles questions.

Il a également eu une manière particulière d'aborder le « choc des civilisations » moderne en soulignant qu'il s'agissait surtout d'un « choc des ignorances ». Il précise que cette ignorance appartient à la fois au passé et au présent, et qu'il croit sans équivoque que cette ignorance aurait pu être évitée s'il y avait eu plus de dialogue et de compréhension entre les mondes judéo-chrétien et musulman. Il voit toujours clairement où la démocratie n'a pas réussi à créer des ressources humaines et institutionnelles pour soutenir les jeunes démocraties. C'est un observateur sage et quelque peu triste vis-à-vis du fait que la corruption peut naître de l'incompétence parfois pure et simple de l'échec démocratique.

Mais il est un modèle pour nous tous, en croyant au pouvoir de la démocratie. Car il comprend que les institutions qui participent à la vie démocratique ont besoin d'être flexibles et diversifiées. Et, plus important encore, que les capacités du public et sa compréhension de la démocratie ne peuvent naître que par l'éducation et la sensibilisation. Enfin, il voit et souligne la nécessité de renforcer l'intégrité publique en tant que fondement important et solide sur lequel la démocratie peut reposer et demeurer stable. Il nous demande de comprendre que ce ne sont pas seulement les gouvernements qui font fonctionner la démocratie. Grâce à lui, nous réalisons que les citoyens des démocraties les plus abouties sont ceux dans lesquelles ils jouent un rôle grâce à leur énergie bénévole et leur engagement en faveur du bien commun.

En commémoration de ce prix, j'ai demandé à la sculptrice Anna Williams de créer une médaille. Elle représente la déesse inuite de la mer, Sedna, émergeant des vagues de l'Arctique pour remettre un monde vulnérable aux bras tendus d'un gardien triomphal ailé.

En raison de sa sagesse, de son sens pratique et de son engagement immuable en faveur de l'amélioration du monde à travers une compréhension réaliste de la manière dont la démocratie peut amener les citoyens à leur niveau de participation le plus élevé, j'ai le grand plaisir d'honorer Son Altesse l'Aga Khan avec ce premier Prix pour une citoyenneté globale.