À chaque mousson, les inondations et les îlots de chaleur paralysent Karachi. Dans cette rue bordée de bâtiments historiques, d’anciens logements situés au-dessus des commerces avaient été transformés en bureaux ou en espaces de stockage, les familles y habitant à l’époque ayant fui la pollution. Encore récemment, un enchevêtrement de câbles masquait des façades autrefois élégantes. L’intervention de Yasmeen Lari a transformé cet espace en une enclave éco-urbaine parée aux inondations et axée sur la valorisation du patrimoine - un succès qui a déjà inspiré des projets similaires ailleurs dans la ville.

Des matériaux à faible empreinte carbone viennent ici remplacer le béton : murs en briques, plaques en bambou pour couvrir les sillons dans lesquels sont enterrés les câbles ou encore pavés poreux en terre cuite fabriqués à la main. Les eaux de pluie sont absorbées dans le pavage ou orientées vers des puits aquifères qui irriguent quatre « forêts » denses plantées au centre de la rue, dont l’objectif est de rafraîchir l’espace, d’améliorer la qualité de l’air et de renforcer la biodiversité. Les pavés sont agencés en cercles concentriques, ponctués de carreaux ornés de représentations de bâtiments historiques de Karachi, une imagerie qui vient renforcer la fierté des habitants envers leur patrimoine. La production artisanale de ces pavés en terre cuite illustre comment la revitalisation des savoir-faire peut mettre un frein à l’exode rural par l’ouverture d’emplois durables à de nombreuses personnes auparavant contraintes à la mendicité, notamment des femmes.