En République kirghize, le travail du Réseau Aga Khan de développement (AKDN) en matière de développement culturel est centré sur la musique et l'enseignement musical en tant qu'outils de développement. Historiquement, la musique et les musiciens tiennent une place primordiale en Asie centrale, et peut-être encore plus dans la culture kirghize, où la musique et la poésie orale étaient traditionnellement transmises oralement du maître (Ustad) à l'apprenti (Shagird).
Au cours de l'ère soviétique, cette tradition s'est arrêtée et s'est muée en une éducation musicale de style occidental, focalisée sur l'étude d'instruments comme le piano, l'accordéon et la balalaïka. Après la chute de l'Union soviétique, un gouffre en matière de soutien aux arts et à la culture a été comblé par un afflux de populations occidentales. Conscient de l’importance de la revitalisation des traditions musicales locales, Son Altesse l'Aga Khan a créé l'Initiative Aga Khan pour la musique (AKMI) en 2000, désormais connue sous le nom de Programme Aga Khan pour la musique (AKMP).
8 000
Le Centre Ustatshakirt, créé par le Programme Aga Khan pour la musique, propose des cours de théâtre, de littérature et de musique traditionnels à 8 000 élèves du primaire et du secondaire.
En 2003, le Programme Aga Khan pour la musique a contribué à la création du Centre Ustatshakirt à Bichkek. Sa mission était alors de développer, tester et promouvoir un enseignement innovant de la musique et de soutenir des maîtres enseignants et des fabricants d'instruments dans la transmission de leurs connaissances et de leur savoir-faire. Le Centre Ustatshakirt est actuellement actif dans les sept régions de la République kirghize et collabore avec des établissements scolaires à tous les niveaux, du primaire au supérieur.
Le programme Umtul du Centre Ustatshakirt propose des modèles et des méthodologies adaptables pour l'enseignement de la musique. Ce programme est destiné aux élèves du primaire et du secondaire du système éducatif général. Sous l'égide du programme Umtul, le Centre Ustatshakirt dirige également un réseau de clubs de théâtre au niveau national, dans le cadre duquel les élèves peuvent écrire et mettre en scène leurs pièces dont les thèmes mettent en avant les valeurs du pluralisme culturel. Entre autres activités, les élèves apprennent à réciter des extraits de l'épopée monumentale de Manas, largement considérée comme l'héritage le plus précieux du patrimoine national kirghize.
Le Centre Ustatshakirt propose actuellement plus de 200 classes dans le cadre de son programme Umtul, dont bénéficient près de 8 000 élèves dans 41 écoles. Muzchyrak, un programme complémentaire, propose des séminaires et des cours accélérés pour les enseignants en musique qui leur permettent de développer des compétences pour l'enseignement et la création musicale, et leur fournit un répertoire musical et des instruments pour former des ensembles avec les enfants. Depuis la création du programme, quelque 2 000 instruments ont été offerts aux enseignants.
Tout comme les programmes Umtul et Muzchyrak, le Centre Ustatshakirt possède son propre ensemble de jeunes musiciens interprètes. En plus d'une formation rigoureuse sur les instruments kirghizes, ces artistes en herbe étudient l'arrangement et la composition de la musique afin d'adapter les styles et les genres musicaux traditionnels du pays aux langages et idiomes artistiques néotraditionnels et contemporains. L'ensemble, qui se compose de diplômés des programmes du Centre Ustatshakirt, joue un rôle actif dans les événements organisés par l'AKDN dans toute la République kirghize. En 2019, l'ensemble s'est produit au siège de l'UNESCO à Paris et a ainsi eu l’occasion de mettre en lumière la musique et la culture kirghizes, alors que le pays venait d’obtenir un siège au conseil exécutif de l’organisation.
La musique kirghize a bénéficié d’une présence notable dans d'autres projets du Programme Aga Khan pour la musique, par exemple dans Music of Central Asia (Musique d’Asie centrale), une anthologie CD-DVD en 10 volumes, diffusée dans le monde entier par Smithsonian Folkways Recordings et dont le premier volume (2006) met en lumière l'ensemble Tengir-Too, dirigé par Nurlanbek Nyshanov. On retrouve également la musique kirghize dans le manuel exhaustif The Music of Central Asia (La musique d’Asie centrale), publié par Indiana University Press (2016) et co-édité par Elmira Köchümkulova, présidente de l’Unité pour le patrimoine culturel et les sciences humaines (CHHU) de l'Université d’Asie centrale (UCA) et professeure associée de l’École des arts et des sciences de l'UCA. En 2018, le Programme Aga Khan pour la musique a présenté la production Qyrq Qyz (Les 40 filles), réinterprétation multimédia d'un ancien récit épique d'Asie Centrale, qui compte parmi ses interprètes Makhabat Kobogonova, multi-instrumentiste et chanteuse kirghize. Qyrq Qyz a fait la tournée des États-Unis et s'est produit dans de prestigieuses salles en France, en Allemagne et en Ouzbékistan.
L’Unité pour le patrimoine culturel et les sciences humaines de l'Université d’Asie centrale aide les différents peuples de la région à préserver et tirer parti de leurs riches traditions culturelles et leur patrimoine pour leur avenir au travers de programmes de recherche et d’initiatives de documentation, d'enseignement et de sensibilisation. Ces différentes activités ouvrent de nouvelles discussions autour du patrimoine et de l'identité de l'Asie Centrale et traitent de sujets relatifs à la culture contemporaine et aux institutions culturelles.
Pour atteindre ses objectifs, la CHHU travaille avec un réseau régional d'étudiants et de professionnels de la culture. En outre, ses enseignants donnent des cours dans le cadre du programme d’arts libéraux de l'École des arts et des sciences de l’UCA.