Pakistan · 11 février 2019 · 4 min
Ali Gohar Chang, titulaire d’une maîtrise en éducation depuis 2007, a ressenti une certaine tension autour de lui lors de son premier jour en tant que principal de l'Ecole Publique de Sukkur (PSS), en juillet 2013.
En effet, lorsqu'il est entré en fonction, les enseignants n’étaient plus payés depuis des mois et étaient par conséquent en grève. Des manifestations à l’encontre de l’ancien principal avaient par ailleurs dégénéré, ce qui avait nécessité l’intervention de la police à l’école. Les parents étaient réticents à y envoyer leurs enfants, et il y avait un sérieux manque de confiance entre la direction et les membres du personnel.
L’école elle-même était en mauvais état, car beaucoup de ses équipements étaient abandonnés et non entretenus. Il était clair que cette institution nécessitait de profondes réformes. M. Chang a donc fait face en commençant par effectuer une analyse approfondie des forces, des faiblesses, des perspectives et des menaces de l’école.
Les enseignants sont les piliers de toute école, c’est la raison pour laquelle il a également analysé leurs performances et les problèmes qu’ils rencontraient afin de mettre en place une stratégie visant à les convaincre d’endosser la responsabilité de bâtir l’avenir de l’école.
« Ils [les enseignants] avaient depuis longtemps cette crainte que mon titre de principal ne me place du côté de la direction » se rappelle M. Chang. « Mais je leur ai expliqué que je venais du milieu enseignant et que j'étais de leur côté ». M. Chang a par la suite combiné des compétences acquises lors de la préparation de sa maîtrise d'éducation à l'Institut pour le développement de l’éducation (IED) de l'AKU pour lancer un programme de formation. Grâce à ce programme, il a pu proposer un retour constructif aux enseignants sur leurs pratiques en classe et démontrer la valeur de différentes méthodes d'enseignement.
Sa première réunion avec les enseignants a connu des débuts difficiles, car ces derniers étaient mécontents d’avoir été appelés durant les vacances d’été. Mais au fur et à mesure de cette rencontre de trois heures, M. Chang a réussi à leur montrer la façon dont ils pouvaient contribuer aux progrès de l’école. Les enseignants de son côté, il a commencé à mettre en œuvre l’étape suivante de sa stratégie afin de transformer l’institution en une école où les parents et la communauté seraient fiers d’inscrire leurs enfants.
Cela nécessitait cependant des investissements de la part des parties prenantes de l’école afin de pouvoir à nouveau payer les salaires et de moderniser les équipements. Lorsque M. Chang a pris ses nouvelles fonctions en juillet 2013, il a découvert que le laboratoire de sciences de l’école était fermé depuis 10 ans et qu'il n’y avait pas une seule salle informatique. En travaillant en collaboration avec des responsables du gouvernement du Sindh et une université du secteur privé, l’Institute of Business Administration (IBA) de Sukkur, à laquelle l’école avait été rattachée, M. Chang a entrepris d’organiser les fonds pour la rénovation de l’école.
Au cours de l’année suivante, trois salles informatiques dotées de l’Internet haut débit ont été installées, des laboratoires de sciences avancées ont été mis en place et le processus de rénovation du bâtiment principal de l’école a été lancé. En 2014, M. Chang a également fait de l’école la seule institution de la région à organiser des examens à huis clos, une initiative audacieuse dont le but est de lutter contre la culture de triche omniprésente dans ces établissements. Ce faisant, le gouvernement du Sindh a désigné l’école comme centre d’examen modèle, une étape qui a renforcé sa réputation.
La PSS, désormais connue sous le nom de IBA Public School Sukkur, accueille 2 500 élèves, un nombre plus de trois fois supérieur en comparaison de l’époque où M. Chang est entré en fonction. Beaucoup de parents souhaitent désormais y inscrire leurs enfants, à tel point qu’une récente campagne d’inscriptions a enregistré 1 300 demandes pour seulement 200 places.
Cela fait désormais plus de cinq ans que M. Chang a rejoint l’école, et ce dernier continue de s’assurer que les normes d’enseignement restent au plus haut et a mis en place un programme de perfectionnement professionnel interne pour les enseignants, une initiative qu’il dirige toujours.
Selon lui, il doit sa réussite à ses études à l’IED : « l’IED m’a préparé et m’a transmis la compréhension théorique et pratique de l’éducation dans un contexte occidental et local. Les compétences que j’ai développées là-bas m'ont donné confiance en moi et en ma capacité à faire une différence. »
« Lorsque j’étais à l’IED, j’ai également renforcé mes compétences en communication et en leadership, et ma capacité à planifier, à être convaincant et à être multitâches. Ces compétences ont été cruciales lorsque j’ai tenté de relancer l’école. »
M. Chang a également salué le rôle de l’un de ses conseillers, le Professeur Nisar Ahmed Siddiqui, directeur de l’IBA Sukkur, qui l’a soutenu lorsqu’il était confronté à de nombreux défis à l’école.
NOTE
Au Pakistan, l'Institut est une véritable ressource nationale, et son incidence sur les politiques et les pratiques est importante et largement saluée. La politique d'éducation nationale de 2009, le cadre national de perfectionnement professionnel des enseignants, le plan pour le secteur de l'éducation dans le Sindh, la réforme des programmes d'études dans le Sindh et au niveau national et le développement de manuels scolaires, également dans le Sindh, portent tous l'empreinte de l'Institut. Dans le pays, l'IED a joué un rôle déterminant dans la création de nombreuses associations de professionnels de l'éducation qui proposent continuellement des opportunités d'apprentissage à leurs membres.